CARTA PASTORAL NAVIDAD 2007 (Francés)

L'HUMILITÉ ET LA MISÉRICORDE DU CHRIST
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LETTRE PASTORALE POUR LA NATIVITÉ DU SEIGNEUR 2007
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à tout le clergé, aux moines et au peuple orthodoxe de toute la Métropole
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Révérends Pères,
Chers fidèles,
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En ces jours de fête pour toute la chrétienté, la Nativité de notre Seigneur Jésus-Christ dans la crèche de Bethéem de Judée est pour nous un appel à la vigilance, à essayer de vivre l’humilité et la miséricorde sacrificielle que le Fils de Dieu a vécue envers nous et envers toute l’humanité pour laquelle Il s’est incarné, afin de la sauver. L’état de l’humilité que le Christ – le Fils de Dieu – va accepter de vivre parmi nous, avec nous et pour nous, est vue et annoncée par les prophètes de l’Ancien Testament. Le prophète Isaïe dit: «Qui donc a cru à ce que nous avons entendu dire? Le bras du Seigneur, en faveur de qui a-t-il été dévoilé? Devant lui, celui-là végétait comme un rejeton, comme une racine sortant d’une terre aride; il n’avait ni aspect, ni prestance tels que nous le remarquions, ni apparence telle que nous le recherchions. Il était méprisé, laissé de côté par les hommes, homme de douleurs, familier de la souffrance, tel celui devant qui l’on cache son visage; oui, méprisé, nous ne l’estimions nullement. En fait, ce sont nos souffrances qu’il a portées, ce sont nos douleurs qu’il a supportées, et nous, nous l’estimions touché, frappé par Dieu et humilié » (Is 53, 1-4). Isaïe est l’un des prophètes de l’Ancien Testament qui annonce par ses prophéties que Le Très Haut va envoyer son Fils comme esclave, comme serviteur, comme le plus petit parmi les fils des hommes, justement pour libérer les fils des hommes, l’homme qui gît dans la souffrance et la mort, dans les ténèbres, dans la peur, dans l’indifférence et dans l’oubli, – mais que Dieu aime et vient chercher là où il est: dans la joie éternelle qui jaillit de son être-même, dans l’amour toujours donateur de lumière du Père, avec le Fils et le saint Esprit, de la sainte Trinité – notre Dieu. L’appel que le Christ nous fait sans cesse est un appel par cette humilité sans bornes par laquelle Il se fait entendre et voir par nous. «Prenez sur vous mon joug et mettez-vous à mon école, car Je suis doux et humble de coeur, et vous trouverez le repos de vos âmes» (Mt 11, 29). «En vérité, s’Il n’était pas humble – dit saint Jean Chrysostome – étant le Fils du Très Haut, aurait-Il choisi d’avoir pour Mère une modeste fille du peuple? S’Il n’était pas humble, Lui, qui est le Donateur de vie de toute la création, aurait-Il accepté de naître dans une pauvre crèche?»
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Non seulement il s’humilie « prenant la forme d’un esclave»…, mais Il ne peut se faire voir et accepter que si nous avons les yeux du cœur dans l’état de l’humilité pour regarder et chercher là où nous ne pensons pas que Dieu pourrait être: Enfant, dans une crèche, avec des animaux à côté. Hérode non plus n’a pu le voir et le comprendre que comme un rival; c’est pourquoi il cherchait à le tuer, mettant à mort tant d’enfants innocents à sa place. Comment le Créateur pourrait-Il devenir Lui-même rival de sa Création pour des choses périssables et éphémères de cette vie? Ceux qui vont le tuer plus tard ou qui veulent le tuer aujourd’hui encore c’est parce qu’ils ne vont plus le voir, car ils ne sont pas capables d’accepter et de sentir son humilité. Pourquoi a-t-on besoin d’un Dieu si humble? C’est trop, et trop audacieux pour eux que Dieu vienne et qu’Il soit si humble, si effacé, si mystérieux, invisible, insaisissable, anonyme, imprévu, même si les Ecritures parlaient justement de cela. Toutes ces choses ont surpris et surprennent les hommes d’autrefois comme ceux d’aujourd’hui. Tous nous nous imaginons comment cela devrait être, comment Dieu devrait se manifester, mais nous acceptons difficilement de le recevoir tel qu’Il est, tel qu’Il est venu à Bethléem, et qu’Il vient aujourd’hui, tel qu’Il vient dans notre vie personnelle et dans celle du monde. Nous l’accusons d’être absent de notre souffrance, de notre chemin, de la voie du mal, qui en apparence n’hésite pas à prendre sous son emprise l’homme et le monde. Nous oublions, ou nous n’avons jamais su le regarder, le reconnaître, le chercher là où Il est, l’identifier avec ceux avec qui Lui-même dit s’identifier, le voir avec les yeux avec lesquels Il nous dit que nous pouvons le voir, l’aimer avec l’amour qu’Il nous montre et dans lequel il se reconnaît et se montre à nous, le voir dans la lumière dans laquelle nous pouvons véritablement le voir, l’accueillir avec le cœur avec lequel Il nous dit que nous pouvons l’accueillir: le coeur miséricordieux.
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«Soyez miséricordieux, comme votre Père céleste est miséricordieux », «heureux les miséricordieux, car ils leur sera fait miséricorde» (Mat 5, 7) – voici l’appel du Sauveur du monde, Celui qui est né dans la crèche du Bethléem. La miséricorde! Soyons miséricordieux, comme le Christ et son Père des cieux. Sa venue même dans le corps est le signe le plus grand et le plus indubitable de sa miséricorde pour nous. Et Il nous demande à nous aussi d’être miséricordieux, à l’image du Père. Non pas autrement! Nous vivons cette grande fête sous le signe de la miséricorde, car nous faisons des cadeaux, ou, – étant enfants –, nous apprenons à offrir. Les années passées,je vous exhortais à offrir des dons aux pauvres, à la fin du Carême de Noël, lorsque nous avons renoncé à certaines choses, pour que notre carême ait aussi ce sens du renoncement, pour donner à ceux qui sont dans un plus grand besoin que nous. Faisons de même cette année, ou bien par notre paroisse, ou bien personnellement, à ceux que nous connaissons. «Celui qui a pitié du faible prête au Seigneur qui le lui rendra» (Prov. 19, 17). «Pour un pauvre, c’est le Christ même qui tend sa droite et reçoit ce que tu donnes, – dit saint Jean Chrysostome. Celui qui fait tomber la pluie te demande un peu. Celui qui …. te demande d’être miséricordieux, Celui qui couvre le ciel des nuages prends de toi ton vieux manteau… car le pauvre tend la main, mais c’est le Christ qui reçoit.» Comment allons-nous nous tenir devant lui à la fin des siècles, sans avoir été miséricordieux envers nos frères, quels qu’auront été leurs besoins, spirituels ou corporels? La miséricorde est celle qui seule peut nous faire voir au plus profond de l’autre, parce qu’elle nous fait nous identifier avec lui, de même que le Christ l’a fait (Mt 25).
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Le carême de Noël est aussi pour nous une période de préparation pour pouvoir nous approcher de la sainte Eucharistie, du saint Corps et sang de notre Sauveur, avec un cœur pur, recevant et accordant à notre tour le pardon à tous. Et non pas seulement! «Le corps de Jésus-Christ qui est sur l’autel, n’a pas besoin d’habits précieux qui le couvrent, mais d’âmes pures qui le reçoivent, - dit aussi saint Jean Chrysostome – mais les pauvres ont besoin de notre assistance et de tous nos soins. Apprenons donc à honorer le Christ comme Il le souhaite, c’est-à-dire en lui faisant l’aumône dans la personne des pauvres. Dieu, comme je vous l’ai déjà dit, ne cherche point des vases d’argent, mais des âmes d’or.» (Homélie L sur Saint-Matthieu).
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Chers frères,
Voici deux dons que le Christ nous fait en naissant dans la fraîcheur de la grotte: l’humilité et la miséricorde. Ce sont les siennes, mais Il nous les donne à nous aussi. Elles peuvent faire de nous les disciples du Christ. Il est devenu pauvre par son humilité et sa miséricorde, afin que nous puissions nous enrichir par elles. Mais il s’agit d’une richesse que nous ne pouvons pas trouver à la première recherche, nous avons besoin de patience et simplicité pour l’acquérir, puisque c’est le trésor éternel et sans prix qui se cache dans ces dons.Cher Père,Bien-aimés frères dans le Christ,Cette année qui vient de passer, a été rappelé près du Seigneur le Patriarche de l’Eglise Orthodoxe Roumaine, de bienheureuse mémoire, Sa Béatitude Teoctist. Sa sagesse était à la mesure de son âge patriarcal, que le Seigneur lui a donné, et nous tous nous nous sommes abreuvés à sa sagesse. Que le Seigneur lui donne le repos dans les tabernacles des justes.Cette année aussi, le Seigneur nous a donné un nouveau patriarche, Sa Béatitude Daniel, celui qui a pris le gouvernail de notre Eglise, étant installé le 30 septembre. Nous prions tous qu’il ait part à un patriarcat plein de fruits et de bénédiction.
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Dans notre Métropole nous avons eu part également à des changements. Cette année ont été fondés l’évêché d’Italie et l’évêché d’Espagne et du Portugal, pour lesquels nous nous préparons à élire des évêques. Dans toutes ces démarches nous avons besoin de vos prières, vous qui êtes les pierres vivantes de l’Eglise du Christ.Dans tout ce que vous faites, n’oubliez pas que « tout don parfait vient du Père des lumières » et que c’est de là-haut que nous devons demander et recevoir tout don.Que le Seigneur, qui aujourd’hui s’est fait petit Enfant, vous donne de recevoir, à l’occasion de ces fêtes, beaucoup de tranquillité et de paix spirituelle, et un Nouvel An 2008 plein de bon fruits.
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† Le Métropolite Joseph
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Paris, La Nativité du Seigneur 2007